L’art et l’Aître d’Étienne Taburet
Du 19 septembre au 6 octobre 2024, la ville de Rennes accueille, pour sa deuxième édition, le Festival Georges, une biennale d'architecture organisée dans les rues rennaises par la Maison de l'architecture et des espaces en Bretagne (MaeB).
La rédaction de L'Architecture d'Aujourd'hui est heureuse de renouveler son partenariat avec l'événement. Pour l'occasion, est allée à la rencontre des différents intervenant·es, artistes, architectes, designers pour qu'ils et elles racontent leur vision du thème de cette année : les limites. Rencontre avec l'artiste Étienne Taburet.
Pourriez-vous présenter en quelques mots votre intervention pour cette nouvelle édition du festival Georges ?
Aître propose un parcours à pieds, À la conquête de l’Ouest et en trois étapes : celles-ci, de deux heures chacune, consistent à déambuler à travers la ville et ses marges. Nous avons l’habitude d’envisager la ville par son centre et par les monuments « historiques » mais la vétusté d’une charpente ou d’une pierre n’en fait pas ses qualités artistiques et architecturales. Le choix ici est d’ouvrir les imaginaires à partir de nos limites, en interrogeant les espaces frontières de Rennes, en reprenant un des grands mythes de la modernité : la conquête des espaces pionniers, à l’ouest des États-Unis d’Amérique au XXe siècle. Les enjeux actuels de sobriété foncière, de densification, de mobilité, et d’adhésion de la population au projet de la cité sont des axes qui nous semblent particulièrement s’expérimenter dans des lieux au ban des centres de nos villes, des banlieues aux zones commerciales.
Cette année, le festival invite à « explorer les limites ». Comment comprenez-vous cette consigne, dans le cadre de votre travail ?
Aître est un projet artistique. L’œuvre d’art (une peinture, une installation ou une architecture) est souvent réduite à un objet plus ou moins joli, éco-responsable, utile, respectueux… Pour nous, ce peut être un objet, mais nécessairement à l’œuvre dans un contexte, dans un cadre. Être à l’œuvre, c’est interroger ses cadres, ses limites.
Il ne s’agit pas de cocher des cases, par automatisme, il nous faut penser les cases et leurs membranes davantage que des frontières aux murs infranchissables. Il nous faut élargir nos imaginaires ; c’est une nécessité pour nous, artistes, et la thématique du Festival Georges rejoint notre ambition !
Selon vous, où réside l’intérêt d’un « festival d’architecture » ?
L’intérêt d’un « festival d’architecture » c’est justement d’expérimenter l’architecture. Là où souvent nos aprioris nous conduisent à réduire l’architecture à un enjeu de distinction sociale, de bon goût, ou à des enjeux techniques. Le festival peut permettre de vivre une expérience de l’architecture et peut-être, de considérer l’architecture dans le champ élargi, « in the Expanded Field » comme aurait dit Rosalind Krauss, professeure en histoire de l’art à l’université Columbia (USA) et l’une des personnes les plus influentes de la modernité. Un « festival d’architecture » c’est un rendez-vous dans un espace et un moment pour démontrer que l’architecture n’est pas seulement l’affaire des architectes, mais bien des praticiens de l’architecture et des citoyens à l’œuvre d’une cité poreuse aux discernements citoyens… faire par exemple de la marche une pratique critique à l’œuvre de l’architecture.